« Francesco Saraceno nous rappelle les jours, pas si lointains que ça, où certains croyaient en la fée confiance (c’est-à-dire l’idée selon laquelle l’austérité budgétaire puisse stimuler l’activité). Il se penche sur une récente étude de la BCE montrant que la confiance (telle qu’elle est mesurée par les enquêtes) chute clairement suite à l’austérité budgétaire. La fée confiance ne secoue pas sa baguette pour améliorer les choses ; en fait, elle peut aggraver les effets de l’austérité budgétaire.
Cependant, en regardant l’étude plus en détails, je note quelques résultats de premier abord surprenants. En particulier, la réduction des recettes semble avoir un plus gros impact sur la confiance des ménages que la réduction des dépenses publiques. En termes d’impact sur le PIB, la théorie (et la plupart, mais pas l’ensemble, des analyses empiriques) suggère que les réductions temporaires des dépenses publiques vont avoir un plus large impact sur l’activité globale que des hausses temporaires d’impôts, s’il n’y a pas de compensation par l’assouplissement monétaire et si les effets d’incitation ne sont pas très larges. Est-ce que les résultats empiriques sont en contradiction avec cela ?
Pour répondre à cette question vous devez vous poser deux autres questions. Premièrement, qu’est-ce que la confiance des ménages mesure vraiment ? Deuxièmement, chose peut-être plus intéressante, quelle information les annonces budgétaires donnent-elles vraiment ?
La réponse à la première question dépend de plusieurs choses ; certaines sont liées au revenu du ménage, d’autres à la situation économique générale. Si le ménage se préoccupe avant tout des premières, alors il ferait sens qu’une hausse d’impôts puisse avoir un plus large impact sur la confiance qu’une baisse des dépenses publiques. Cela nous dirait peu de choses à propos de l’impact économique des deux types de mesures.
La réponse évidente à la seconde question est que l’information donnée par l’annonce d’une baisse des dépenses publiques ou d’une hausse d’impôts est juste elle-même. Si l’on s’en tient aux impôts, alors si l’annonce n’avait pas été faite, le ménage aurait juste supposé de moindres impôts (pour un temps ou pour toujours ?). Mais c’est naïf d’une perspective intertemporelle et clairement non ricardien. Dans la logique de l’équivalence ricardienne, une hausse des impôts aujourd’hui doit impliquer une réduction des impôts demain pour une trajectoire donnée des dépenses publiques.
Il y a trois manières alternatives, plus "rationnelles", de considérer l’annonce d’une hausse d’impôts. Supposons que le déficit budgétaire actuel du gouvernement soit insoutenable. Les impôts doivent être relevés soit aujourd’hui, soit demain après un nouvel emprunt. L’annonce nous renseigne alors à propos du calendrier de la hausse d’impôt. Si l’équivalence ricardienne est valide, cela n’aura pas d’impact sur les revenus actualisés perçus tout au long de la vie, mais si pour une quelconque raison elle n’est pas valide, alors une hausse d’impôts aujourd’hui peut déprimer la confiance des ménages. Cependant, dans la mesure où la confiance dépend de la situation économique générale, vous vous attendriez à ce que l’annonce d’une réduction des dépenses publiques ait un plus grand impact que l’annonce d’une hausse d’impôts (avec les mises en garde citées ci-dessus) en raison du lissage de la consommation. Dans ce cas, les réductions des dépenses publiques réduiraient davantage la confiance que les hausses d’impôts.
Une deuxième possibilité est que la hausse des impôts puisse signaler quelque chose à propos de la situation économique future. Peut-être que les ménages pensaient que le déficit était soutenable parce qu’ils étaient optimistes à propos de la croissance future, mais la hausse des impôts leur dit d’être moins optimistes. Un moindre optimisme peut affaiblir la confiance. Dans la mesure où l’action fiscale donne une information à propos des revenus avant imposition futurs, la hausse des impôts fournit la même information qu’une baisse des dépenses.
Une dernière possibilité, qui est généralement ignorée lorsque l’on discute de la possibilité d’équivalence ricardienne, est que l’annonce d’une hausse d’impôts renseigne les ménages à propos de la composition de toute consolidation budgétaire. Supposons encore que le déficit soit insoutenable. Soit les impôts doivent être relevés, soit les dépenses doivent être réduites, mais les ménages ne savent pas laquelle de ces deux options sera prise. Si les dépenses sont réduites, cela suggère aux ménages que les impôts ne vont pas augmenter, ce qui en termes de revenu représenterait un plus pour un ménage. Donc dans ce cas, une baisse des dépenses peut accroître la confiance des ménages.
Essayer d’évaluer l’impact des actions budgétaires passées est compliqué, en grande partie parce qu’il est difficile de savoir ce qu’était le contrefactuel ou ce que les gens pensaient que le contrefactuel était. Est-ce que les changements étaient perçus comme temporaires ou permanents ? (Les gouvernements ne le disent pratiquement jamais, et même s’ils le faisaient, les croirait-on ?) Dans quelle mesure les gens internalisent-ils la contrainte budgétaire du gouvernement ? S’ils le font, les changements budgétaires nous disent-ils quelque chose à propos du calendrier des impôts ou dépenses publiques ou de leur combinaison ou de quelque chose d’autre ? Je pense que ces difficultés apparaissent si nous cherchons à évaluer l’impact des changements budgétaires sur la confiance ou sur l’activité elle-même. »
Simon Wren-Lewis, « Confidence », Mainly Macro (blog), 15 avril 2015. Traduit par Martin Anota
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