mardi 8 avril 2025

Pourquoi l'Amérique agit ainsi avec le commerce international

« Il est difficile de comprendre la politique commerciale américaine ces derniers temps. Mais c'est quasiment impossible de le faire si l’on ne comprend pas le mécontentement de la classe moyenne américaine et la manière par laquelle celui-ci s'est accumulé au fil des décennies aussi bien sous les démocrates que sous les républicains.

Il faut un peu d'effort, et même un certain inconfort, pour lire à propos des échecs des démocrates traditionnels et des républicains traditionnels, mais le point positif est qu'une fois que vous avez fait cet effort vous comprendrez à quel point la nouvelle attitude des États-Unis est susceptible de persister.

En résumé, le malaise de la classe moyenne et la colère qui en résulte ont conduit les États-Unis à adopter une attitude hésitante face au commerce international durant le premier mandat d'Obama. Cette hésitation s'est muée en hostilité lors du premier mandat de Trump, puis durant son second mandat elle a donné quelque chose proche de l'isolationnisme.

La question de savoir pourquoi la classe moyenne américaine est si en colère est facile à poser, mais il est plus difficile d'y apporter une réponse. La section suivante commence par ma réponse à cette question, puis ensuite un examen de la façon par laquelle elle a émergé au fil des ans.

Pourquoi la classe moyenne américaine est-elle si en colère ?

La colère de la classe moyenne alimentée par des questions d’argent et de statut

La colère qui gronde au sein de la classe moyenne américaine n'est pas irrationnelle : c'est une réalité économique. Beaucoup d'Américains ne peuvent même pas rêver d'acheter le logement où ils ont grandi. Ils n'auront pas la sécurité de l'emploi que leurs parents considéraient comme acquise. Ils trouvent cela difficile de vivre comme des gens de la classe moyenne avec les revenus d’aujourd’hui.

Mais il ne s'agit pas seulement des prix qu'ils paient et du montant qu'ils ont dans leur portefeuille. La fierté compte. Les dernières décennies ont blessé la fierté et ébranlé la confiance de nombreux travailleurs américains dont le rêve américain a été bouleversé, en particulier ceux qui ne sont pas allés à l’Université, mais aussi ceux qui y sont allés.

Le rêve américain n'est pas une promesse de réussite. C'est une croyance. C'est un espoir. C'est l'idée que travailler dur, être présent chaque jour et donner le meilleur de soi permettra à chacun (qu’importe le milieu social) de construire une vie meilleure pour sa famille. Une partie du rêve américain reposait sur la croyance que, quelle que soit la nature des chocs et des changements, chacun avait de bonnes chances d’être parmi les gagnants.

Voici un lien vers une série de graphiques du Pew Research Center illustrant les difficultés socio-économiques de la classe moyenne américaine. Ils montrent que le rêve américain n'a pas toujours été un slogan creux.

Comment les États-Unis en sont-ils arrivés là ?

Le miracle de la classe moyenne après la Grande Dépression

L’essor de la classe moyenne américaine après les ravages de la Grande Dépression n’est rien de moins que miraculeux, alors même que le point de départ était sombre [Milanovic, 2016 ; Stiglitz, 2019].

L'économie américaine et sa classe moyenne ont été anéanties par la Grande Dépression et la confiance Calvin-Coolidge-esque envers les marchés qui guidaient les réactions politiques de Washington. Cela a changé avec les politiques du New Deal de Franklin D. Roosevelt, qui ont été mises en place pour aider les opprimés et les laissés-pour-compte.

Avec le New Deal de Roosevelt, le rôle du gouvernement était d'aider les petites gens, de veiller à la stabilité économique, d'assurer le plein emploi et de protéger les gens des monopoleurs et des manipulations politiques des ploutocrates. C'est alors que la sécurité sociale et l'assurance chômage ont été inventées. Les syndicats et la négociation collective ont été légalisés. La loi sur les normes du travail équitables (Fair Labor Standards Act) a fixé un plancher aux conditions de travail.

Dans l'Amérique où Ronald Reagan a grandi, par exemple, les gens croyaient que l'État était là pour aider les plus démunis. En utilisant l'investissement public, la réglementation financière et les protections sociales, le gouvernement fédéral américain a ravivé l'économie, rétablissant la confiance de la population dans l'économie et le rêve américain.

Les politiques sociales sont réduites : du coup de main à la main invisible

Puis vint la Reaganomics. À partir des années 1980, les États-Unis sont passés de la vision rooseveltienne d'un État protecteur à l'économie de l'offre et à la théorie du ruissellement de Ronald Reagan. Lorsque Reagan prit ses fonctions en 1981, le taux d'imposition marginal sur le revenu le plus élevé était d'environ 70 %. Dix ans plus tard, il était tombé à environ 40 %. C’est à ce niveau qu’il est resté pendant 35 ans, inchangé ni par les démocrates, ni par les républicains. 

Ces baisses d'impôts n’ont pas été gratuites : elles ont été financées en érodant les politiques sociales de l’Amérique. Le gouvernement n'a pas éliminé toutes les mesures sociales, car plusieurs d'entre elles étaient trop populaires pour être supprimées. Mais le coup de main visible de l'État a progressivement été remplacé par la main invisible du marché, sapant ainsi le filet de sécurité sur lequel les familles laborieuses pouvaient compter en période difficile.

Les chocs globotiques touchant une classe moyenne sans protection

Cet affaiblissement des politiques sociales a coïncidé avec un autre bouleversement sismique : la révolution des TIC, qui a accéléré l’automatisation industrielle à partir des années 1970 et accéléré la mondialisation à partir de la fin des années 1980. L’impact économique de ce choc combiné, que j’appelle le "choc globotique" (globotics shock) [Baldwin, 2019], a provoqué une dislocation massive de la main-d’œuvre dans toutes les économies avancées. Le volet mondialisation de ce phénomène est souvent appelé le "choc chinois" (China Shock) [Autor et al., 2016 ; Piketty, 2020].

Les TIC affectent différemment les travailleurs peu et très qualifiés : le problème des qualifications

Les avancées rapides dans les technologies d'information et de communication (la révolution des TIC) ont touché de façon disproportionnée les travailleurs moyennement qualifiés exerçant un travail manuel. Nous parlons d'emplois qui, lorsque Reagan était jeune, étaient considérés comme de bons emplois. Comment est-ce possible ?

Les avancées dans les TIC ont créé de meilleurs substituts (via l'automatisation industrielle) au travail manuel moyennement qualifié, en particulier dans les usines. Cela a freiné la croissance de leurs salaires et restreint les opportunités pour ceux qui ont perdu leur emploi. C'est ainsi que le volet technologique de la globotique a miné les revenus et les perspectives d'emploi de la classe moyenne.

C'est exactement l'inverse qui s'est produit pour les travailleurs très qualifiés. Les travailleurs qui avaient un diplôme universitaire et qui occupaient des emplois intensifs en savoir ont tiré profit de la révolution des TIC. L’amélioration des TIC leur ont offert de meilleurs outils de travail, des choses comme les ordinateurs de bureau et portables, des logiciels de bases de données faciles à utiliser, des logiciels d'écriture et des outils d'analyse comme Excel.

Ce contraste marqué peut être considéré comme un "rebondissement des compétences" (skills twist) : les TIC ont créé de meilleurs substituts pour les travailleurs moyennement qualifiés, mais de meilleurs outils pour les travailleurs très qualifiés. Il en a résulté une nette augmentation des inégalités à partir de l'invention de l'ordinateur sur puce en 1973.

Les TIC ont accéléré la mondialisation et des délocalisations

L'impact de la révolution des TIC sur les travailleurs de l’industrie américaine s'est fait sentir dès les années 1970, lorsque les TIC ont automatisé les emplois industriels. À partir de la fin des années 1980, la révolution des TIC a touché les travailleurs américains en facilitant la délocalisation des emplois industriels vers les pays à bas salaires.

La clé a été la manière par laquelle les TIC ont permis de séparer les étapes de production, de les délocaliser vers des économies émergentes lointaines tout en coordonnant toutes les étapes de fabrication. Les TIC ont ainsi rendu possible la délocalisation ; les importantes différences de salaires l'ont rendue rentable.

Un point essentiel, mais sous-estimé, est que cette délocalisation a eu un impact considérable car elle a transféré la technologie de fabrication avancée des entreprises américaines (comme Tesla) vers les économies émergentes, où elle s'est combinée avec un travail à bas salaires. De cette manière, la délocalisation industrielle a créé une nouvelle combinaison hautement compétitive : la haute technologie et les bas salaires. Cela a rendu plus difficile pour les travailleurs des économies avancées, qui bénéficiaient de la haute technologie et de salaires élevés, de rivaliser. Une difficulté similaire a été rencontrée par les travailleurs industriels des pays émergents qui n'ont pas obtenu  les étapes de production délocalisées. Ils étaient en concurrence avec une faible technologie et de bas salaires.

Il s'est avéré que les pays à la fois à haute technologie et à bas salaires ont vu leur part dans l’industrie mondiale s'envoler, en particulier la Chine. Les pays à haute technologie et à hauts salaires ont vu la part de leur industrie dans l’industrie mondiale diminuer. Les pays à faible technologie et à bas salaires du reste du monde ont vu leur part mondiale évoluer très peu. Les chocs globotiques ont frappé l’économie mondiale à un rythme sans précédent puisqu’ils étaient alimentés par la technologie numérique, qui progressait à une vitesse exponentielle.

La dévastation qui en résulta : les pathologies sociales en Amérique

La coup de main de FDR ayant été remplacé par la douche froide du ruissellement, la classe moyenne américaine a eu à faire face seule aux chocs globotiques. Les chocs sans filets de sécurité ont dévasté la classe moyenne, avec des conséquences inédites : des fusillades fréquentes dans les écoles, une crise des opioïdes, une épidémie d’obésité, des faillites médicales, des taux de mortalité maternelle élevés, un endettement étudiant écrasant, des taux d’incarcération parmi les plus élevés au monde, des taux de pauvreté chez les personnes âgées élevés, des niveaux inquiétants de sans-abrisme, une hausse des taux de suicide parmi les classes moyennes peu diplômées et autres morts de désespoir [Case et Denton, 2020]. De telles pathologies sociales sont inconnues à des niveaux comparables dans les autres économies avancées.

La frustration de la classe moyenne : voir les riches s'éloigner tandis que les pauvres la rattrapent

Pendant ce temps, la classe moyenne a été forcée de constater que les riches s’éloignaient davantage d’elle, tandis que les pauvres la rattrapaient en bas de l'échelle, comme l'a montré John Burn-Murdoch dans sa récente chronique "Data Points" [Burn-Murdoch, 2025]. Si vous y réfléchissez, vous comprendrez que le rêve américain fonctionnait, mais pas pour la classe moyenne.

Les chocs sans politique sociale ont créé une société où les enfants américains effectuent aujourd'hui des exercices de tir actif dans les mêmes écoles où leurs parents faisaient des exercices d'incendie. Étrangement, personne ne pense que le système politique américain puisse remédier à cela, ni même qu'il devrait essayer. La conséquence a été des bouleversements économiques et sociaux qui ont engendré un malaise profond et persistant de la classe moyenne.

Mécontentement et contrecoup américains

Il n'est guère surprenant que la classe moyenne ait nourri une colère profonde et justifiée. Tous les quatre ans, elle élisait un démocrate ou un républicain traditionnel, mais aucun d'entre eux n'apportait d’aide significative. Ils n’ont même pas proposé de plan crédible pour résoudre les problèmes socio-économiques de l'Amérique, car la mise en place des politiques sociales nécessaires aurait nécessité une hausse des impôts, une mesure devenue politiquement impossible aux États-Unis pour des raisons difficiles à saisir.

Compte tenu de tout cela, un contrecoup populiste était presque inévitable. Après 40 ans de malaise croissant de la classe moyenne et sans véritable solution, les Américains ont élu un milliardaire qui imputait la responsabilité de la dévastation de la classe moyenne à la mondialisation et au "wokisme". Ce milliardaire a promis d'aider la classe moyenne en supprimant encore plus de politiques sociales, en réduisant les impôts des entreprises et des plus aisés. Il est difficile de voir comment cela a pu être un argument vendu pour la classe moyenne américaine, mais cela a fonctionné.

Mon explication est que leur colère envers les démocrates et les républicains traditionnels pour les avoir laissés tomber pendant des décennies les a poussés à tenter quelque chose, n'importe quoi, qui ne soit pas similaire. Quelque chose devait changer. […] C'est une façon d'appréhender le séisme politique qui s'est produit en novembre 2016 et en novembre 2024.

Pourquoi cette insistance sur la lutte contre le commerce ?

Alors qu’un contrecoup et le populisme sont compréhensibles, la question demeure : pourquoi le populisme d’aujourd’hui est-il porté contre le commerce international ?

Il est important de commencer par expliquer que la réponse apparemment naturelle est fausse. La réponse naturelle est que le commerce international (en l'absence de politiques d'accompagnement) a provoqué les problèmes de la classe moyenne, si bien que les politiques anti-commerce devraient donc les résoudre. Pourquoi est-ce faux ?

Les droits de douane, cependant, ne résoudront pas (et ne peuvent pas résoudre) la situation critique de la classe moyenne américaine. C'est littéralement impossible. Les tarifs douaniers protègent les secteurs produisant des biens, mais peu d’Américains travaillent dans ces secteurs (environ 8 % dans l’industrie manufacturière et environ 2 % dans l’agriculture) ; la plupart ont des emplois de services. Les droits de douane ne peuvent pas être appliqués aux importations de services (les droits de douane sont ajoutés lorsque les marchandises passent la douane, mais les services ne passent pas la douane et ne peuvent donc pas être taxés). Cela signifie que les droits de douane nuisent à la plupart des travailleurs de la classe moyenne ; ils font grimper les prix des biens sans offrir de protection supplémentaire aux emplois du tertiaire. J'attends de voir comment les travailleurs de la classe moyenne occupant des emplois de services réagiront lorsqu'ils constateront que les droits de douane ont fait grimper le prix des produits qu'ils achètent chaque semaine chez Walmart.

Les politiques anti-commerciales comme excuse pour ne pas entreprendre des politiques efficaces

Ainsi, les droits de douane n'aideront pas la classe moyenne. Parallèlement, les solutions utilisées dans d'autres économies avancées pour aider la classe moyenne ne fonctionneront pas puisque l'électeur médian américain est très loin de croire qu'un surcroît d’intervention publique et une hausse d’impôts amélioreraient la situation.

Étant donné qu’il n’y a pas de solution qui soit à la fois économiquement efficace et politiquement réalisable, la classe politique américaine (les démocrates comme les républicains) a eu recours au vieux plan B : convaincre les électeurs que la faute incombe à quelqu'un d'autre. Lorsqu'ils prennent conscience qu'ils ne peuvent résoudre un problème, n'importe quel politicien vous dira qu'il faut trouver un autre coupable. L'ensemble du spectre de la communauté politique américaine a décidé que les étrangers et le commerce de biens étaient d'excellents candidats pour ce rôle de "boucs émissaires", en particulier la Chine.

Résumé et remarques conclusives

Les difficultés persistantes auxquelles est confrontée la classe moyenne américaine sont à l'origine du contrecoup (backlash) qui a porté Donald Trump et ses droits de douane au pouvoir. Mais les malheurs de la classe moyenne américaine ne sont pas le seul résultat des chocs technologiques et commerciaux ; ils ne sont pas non plus imputables à elle seule. A mes yeux, le malaise de la classe moyenne découle des chocs "globotiques" qui frappent une société qui a supprimé les politiques d'ajustement qui avaient aidé la classe moyenne à s'adapter aux chocs par le passé.

Le rôle des politiques sociales manquantes apparaît au centre de la focale lorsqu'on compare les expériences américaines avec celles de toutes les autres économies avancées. Si toutes les autres économies avancées ont souffert des mêmes chocs mondiaux, leurs gouvernements ont mis en place des politiques d'accompagnement qui ont facilité l'ajustement économique. Il y a eu un contrecoup de la classe moyenne, mais grandement modéré, et il a eu tendance à se focaliser sur l'immigration plutôt que sur le commerce international.

Les droits de douane, à mon avis, ne sont pas populaires auprès des politiciens américains, parce qu’ils constituent une solution éprouvée au malaise de la classe moyenne ; les tarifs douaniers sont populaires auprès d'eux parce qu’ils sont un substitut à des mesures politiquement impopulaires qui pourraient fonctionner. Et les droits de douane ont l'avantage secondaire de donner l'impression que les problèmes de la classe moyenne ne sont pas "made in America", alors qu'ils le sont en fait.

Qu’est-ce que cela signifie pour le commerce mondial ? Je vais aborder trois points, comme on devrait toujours le faire.

Premièrement, le malaise de la classe moyenne américaine est là pour durer. La politique commerciale n'y remédiera pas, ne serait-ce que parce que l’essentiel de la classe moyenne travaille dans le secteur des services où les droits de douane ne la protègent pas, mais la nuisent. Les politiques qui pourraient aider nécessiteraient une hausse des impôts et cela est politiquement irréalisable dans le climat politique actuel en Amérique.

Deuxièmement, la position anti-commerce, ou hésitante face au commerce, des États-Unis a débuté avec Obama, et non Trump, et elle survivra probablement longtemps à la présidence de Trump. Le spectre entier de la communauté des décideurs politiques américains a décidé que les étrangers et le commerce de biens étaient d'excellents candidats pour le rôle de "boucs émissaires", en particulier la Chine. Puisqu’il n’y a pas de politiques qui soient à la fois économiquement efficaces et politiquement réalisables, le commerce restera le principal bouc émissaire aux États-Unis dans un avenir proche. 

Troisièmement, le malaise de la classe moyenne américaine ne signifie pas la fin du système commercial mondial tel que nous le connaissons. Les États-Unis représentent moins de 15 % du commerce mondial. Par conséquent, aussi longtemps que les autres pays ne suivent pas l'exemple des États-Unis le commerce devrait globalement se porter bien. »

Richard Baldwin, « Why America is acting this way on trade: A globotics shock, a failed social policy, and middle-class fury », 8 avril 2025. Traduit par Martin Anota

 

Références

Autor, D H, D Dorn and G H Hanson (2016), "The China Shock: Learning from Labor Market Adjustment to Large Changes in Trade," Annual Review of Economics 8: 205-240.

Baldwin, R (2019), The Globotics Upheaval: Globalisation, Robotics and the Future of Work, University Press.

Burn-Murdoch, J (2025), "Inequality hasn’t risen. Here’s why it feels like it has," Financial Times Data Points, 2 January.

Case, A and A Deaton (2020), Deaths of Despair and the Future of Capitalism, Princeton University Press.

Milanovic, B (2016), Global Inequality: A New Approach for the Age of Globalization, Harvard University Press.

Pew Research Center (2024), The State of the American Middle Class, Pew Research Report.

Piketty, T (2020), Capital and Ideology, Belknap Press.

Rodrik, D (2018), "Populism and the Economics of Globalization," Journal of International Business Policy 1(1-2): 12-33.

Stiglitz, J E (2019), People, Power, and Profits: Progressive Capitalism for an Age of Discontent, W.W. Norton & Company.


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